Le caniveau...
... Le caniveau regorge d'eau... Elle court, court, montant sur les rebords en vaguelettes claires et vives... C'est l'orage et la pluie est tombée en trombe d'eau. Le caniveau n'en peut plus de canaliser le liquide et donne à la rue assombrie par les gros nuages bas, un air de cataclysme !
Pourtant en entrant chez le boulanger, je souris. La boulangère étonnée, me demande si j'aime la pluie ? Ben non, pas trop, enfin c'est surtout les orages que je n'aime pas ! Mais le trottoir débordant d'eau me fait penser à mon enfance.
Car après l'orage, que nous regardions derrière la fenêtre, en comptant après l'éclair le nombre de secondes pour boucher nos oreilles, enfin à l'accalmie, nous sortions pour profiter de l'eau qui dévalait dans les caniveaux. Alors, on s'installait les unes à côté des autres, alignées sur le trottoir, à genoux et l'on singeait les lavandières du lavoir municipal avec des savonnettes à la rose et des brosses à ongle pour frotter les tissus. Nous nous servions de cette eau limpide et courante qui coulait très fort pour laver nos petits linges de poupée ! On s'aspergeait et le chahut n'était pas très loin ! Il n'y avait pas de danger à cette époque, car peu de voitures circulaient. Seules les charrettes à foin ou bien les chevaux attelés passaient sur la route. Et puis, la chaleur lourde avait énervé ces petites filles confinées dans les maisons ! Alors, c'était l'objet de bagarres à coup de savonnettes, de torchons mouillés... On rentrait trempées, nos robes salies, nos sandalettes de toile comme des éponges et les cheveux, soit raides, soit tout bouclés. Moi, c'était plutôt raide et Tata râlait d'être obligée de les rouler en papillotes pour retrouver un semblant de coiffure de petite fille posée !